Quand on commence à s’intéresser aux risques auxquels on s’expose lors d’une croisière à bord d’un voilier, notre imagination se réveille et bien souvent, s’engouffre dans la brèche ouverte à vitesse grand V.
Elle nous projette ainsi régulièrement dans des situations exagérées, comme une tempête ou un acte de piraterie, nous confronte à l’extrême, comme l’homme à la mer, une collision avec un cargo / un ofni, ou encore un début d’incendie …
Et ce sont d’ailleurs bien ces dangers qui font la plupart du temps frémir en premier lieu notre entourage qui ne partage pas toujours notre attrait pour le grand large.
Cependant, que peut-il nous arriver avec notre voilier parfaitement équipé ? Manœuvres ramenées au cockpit, hautes filières éventuellement protégées de filets, lignes de vie installées sur toute la longueur du pont, cadènes fixées dans le cockpit et en sortie de descente pour capeler les harnais, toiles antiroulis pour éviter de chuter, extincteurs parfaitement accessibles … nous sommes fin prêts à appareiller.
La réalité est, comme souvent, pleine de surprise ! Et oui, finalement, le principal risque qui nous guette en mer a embarqué en même temps que nous. Ce risque majeur auquel nous ne pensons pas toujours de prime abord correspond tout simplement à notre bateau lui-même, enfin surtout à tous les équipements qui le composent !
Découvrons donc ensemble ceux que nous nous sommes amusés à appeler les «7 dangers capitaux du bord», et comment nous en prémunir dans la mesure du possible, afin de nous offrir une relation sympathique et sereine avec notre voilier tout au long de notre cohabitation.
Les “dangers capitaux”du bord
Danger Capital n°1 : La BOME
La bôme, qui permet de maintenir et d’étarquer la bordure de la grand-voile, ne paye pas de mine à première vue. Elle est à votre voilier ce que votre nez est à votre figure, un élément pourtant central mais dont la présence est comme une évidence.
Sous son air anodin, elle cache ainsi parfaitement son jeu car elle constitue bien le danger n°1 à votre bord.
Instable et versatile, elle ne tient pas en place sans parler de ses nombreuses volte-faces, et elle est donc fréquemment responsable de traumatismes crâniens ou de la partie supérieure du corps, quand elle ne projette pas un équipier par-dessus bord après avoir balayé le cockpit d’un mouvement ample et pressé !
Ce sont les manœuvres d’empannage et de prise de ris qui présentent les risques majeurs et il ne faut pas hésiter à s‘équiper de son harnais de sécurité avant de les réaliser.
Au grand largue, il est également vivement conseillé d’installer un dispositif de retenue de bôme afin de se prémunir de toute saute du vent ou mouvement intempestif de votre voilier, qui pourrait générer un empannage surprise et incontrôlé.
Danger Capital n°2 : Les WINCHES
Les winches servent sur un voilier à démultiplier la traction exercée sur les cordages utilisés pour contrôler la voilure. Ils encaissent souvent énormément de tension et peuvent être la source de nombreuses blessures, comme :
- des brûlures lorsqu’une écoute mal coincée dans la gorge de guidage vous file entre les mains,
- l’écrasement d’un doigt si d’aventure vous laissez traîner les vôtres entre l’écoute et le fût du winch ou si vous essayez de décoincer à mains nues un surpatage,
- la fracture des doigts ou du poignet, en cas de « retour de manivelle », lorsqu’un winch est endommagé suite à une rupture de cliquet.
Il est possible également de se blesser en étant projeté sur un winch dans un coup de roulis ou lors d’une embardée du voilier.
La meilleure prévention repose sur une bonne coordination entre équipiers lors des manœuvres et notamment des virements de bord, qui doivent être rapides et précis.
Et n’oubliez jamais qu’une manivelle de winch ne reste jamais à poste ! Elle doit impérativement être rangée après chaque utilisation, tant pour limiter les risques de blessures que pour ne pas la perdre au fond de l’eau si d’aventure elle venait malheureusement à sortir de son emplacement.
Danger Capital n°3 : Les CORDAGES
Un voilier est un nid de cordages. Dès que le vent se lève, ça bat, ça claque, ça gifle, ça fouette et une blessure aux mains ou au visage peut vite arriver.
En effet, les forces de traction exercées par les écoutes et les drisses sont d’autant plus importantes que les surfaces de voile sont grandes. Il est donc facile de comprendre que la moindre erreur de manœuvre peut être responsable d’un traumatisme, tout autant que la défaillance d’un équipement d’accastillage.
Attention donc notamment :
- au chariot d’écoute de grand-voile, qui peut blesser, voir même projeter un équipier mal placé s’il n’est pas bien bloqué
- aux brûlures sévères occasionnées par une écoute rattrapée et freinée avec la main
- aux doigts sectionnés dans une poulie lorsque le cordage retenu à la main n’est pas lâché à temps,
- aux chutes violentes lorsque l’on se prend, par mégarde, le pied dans un cordage et que l’on perd son équilibre
En mer, mieux vaut prendre de bonnes habitudes comme ranger son pont régulièrement, porter des gants, rester à sa place lors des manœuvres et inspecter régulièrement son accastillage pour prévenir toute usure prématurée !
Danger Capital n°4 : Le PONT
Le pont d’un voilier est un vrai champ de mines. Il est truffé d’éléments d’accastillage conçus avec des matériaux abrasifs ou coupants et dont la forme est également souvent assez agressive.
Le danger est donc permanent, notamment pour nos fragiles petits petons qui ne manquent jamais de se cogner dans les taquets, les coinceurs ou les rails d’écoute.
Et n’oublions pas non plus le risque que représente la descente et les hublots de pont. Ouverts lors des manœuvres, ils constituent un danger non négligeable de chute pouvant entraîner contusions, entorse ou même fracture.
Pour limiter tous ces risques, une seule solution : porter systématiquement des chaussures et appliquer sans mesure le célèbre adage du marin « une main pour soi, une main pour le bateau » !
Danger Capital n°5 : L’ANCRE, sa CHAINE et son GUINDEAU
Si la technologie envahit de plus en plus nos voiliers et que nous disposons désormais de multiples aides à la navigation, pour le dispositif de mouillage, rien ne bouge !
Pour nous immobiliser à la surface de l’eau, on n’a pas encore trouvé mieux que l’ancre, sa chaîne et son guideau.
Mais une ancre et sa chaîne représente un sacré poids, qu’il nous faut manipuler dans un espace étroit. Une fois la manœuvre commencée, difficile de l’arrêter sans danger. Un guindeau est un allié précieux mais peu scrupuleux : si une main ou un pied se trouve sur le passage de la chaîne, peut lui importe, il poursuit son travail sans état d’âme. Une télécommande sans fil peut s’avérer être un équipement précieux d’autant qu’il est très peu onéreux, pour rester à une distance respectable et ne pas se mettre en danger.
Vous l’avez compris, la plus grande prudence s’impose au moment des manœuvres de mouillage et il vaut mieux éviter de tous vous précipitez à l’avant de votre voilier.
Et en cas de panne du guindeau, ne remontez pas votre ancre à la seule force de vos bras, adoptez toujours une posture adaptée pour éviter à votre dos de finir avec un sérieux lumbago.
Danger Capital n°6 : Le MOTEUR
Même si nous évitons la plupart du temps d’y avoir recours, notre moteur est parfois d’un sérieux secours qui nous permet d’atteindre notre destination même en l’absence de vent.
Au-delà de nous permettre d’avancer quand la risée se fait très discrète, il contribue assez souvent à notre confort quotidien en nous donnant un coup de main pour produire l’énergie et l’eau chaude dont nous avons également besoin à bord.
Moteur rime donc avec chaleur et intervenir sur ce dernier peut s’avérer dangereux. Il faut se méfier de la chaleur qu’il dégage, tout autant que des éclaboussures d’huile chaudes sans oublier les échappements de gaz qui peuvent parfois causer des nausées.
Sauf urgence et risque de danger, il est utile de s’imposer un peu de patience et de n’intervenir qu’après avoir laissé le moteur bien refroidir.
Il convient par ailleurs d’être extrêmement vigilant lorsqu’une intervention moteur allumé s’impose car les pièces en mouvement (courroie et poulies) peuvent vous happer un doigts ou les habits.
Danger Capital n°7 : L’INTERIEUR
Par gros temps, on a souvent tendance à se réfugier à l’intérieur de notre voilier. On s’y sent bien, on s’y sent en sécurité, comme dans un cocon protecteur. Pourtant, c’est dans ces conditions que la plupart des accidents surviennent, lors des embardées du voilier qui nous envoient valser contre les cloisons ou par la projection d’un objet mal arrimé.
Les brûlures par renversement d’un récipient sont également fréquentes alors dès que la mer commence à faire le dos rond, n’oubliez pas les précautions indispensables en navigation. Rangez et arrimez tout ce qui traîne, limitez vos envies de cuisiner et installez-vous bien calé dans une banette ou votre carré, en attendant que les conditions s’améliorent.
Un voilier parfaitement ordonné est également gage de sécurité en cas d’appareillage d’urgence pour quelque raison que ce soit. Astreignez-vous donc à ranger ce que vous utilisez au fur et à mesure, vous ne le regretterez pas !
Comment prévenir les « dangers capitaux » en croisière ?
Les « dangers capitaux » guettent le marin au quotidien et une coupure, une brûlure, un hématome, une tendinite, une luxation, une entoure ou encore une fracture peut malheureusement survenir sans prévenir.
Si anticipation et vigilance doivent rester les deux mots d’ordre pour chaque équipier embarqué à bord de votre voilier, il ne faut pas jouer à l’autruche et croire que ce type d’accident n’arrive qu’aux autres.
Alors, sans chercher à conjurer le sort, mieux vaut bien s‘équiper pour partir en mer et être ainsi prêt à intervenir à tout moment.
Les équipements de protection élémentaires
En mer, loin d’un port et des secours d’urgence, prudence et prévention s’imposent. Ainsi, au-delà du matériel de sécurité réglementaire, quelques équipements qui ne payent souvent pas de mine sont à embarquer sans tergiverser :
- des chaussures de pont, qui protégeront efficacement vos orteils lors des manœuvres en extérieur
- un couvre-chef, qui vous évitera en journée coups de soleil et insolation, et amortira au besoin un coût de bôme mal intentionné sur votre tête
- des gants bien ajustés, qui mettront vos mains à l’abri de tout risque d’échauffement ou de brûlure, en cas de manœuvres difficiles ou mal maîtrisées
- un harnais de sécurité, pour éviter tout risque de chute à la mer, dès que les conditions se dégradent et que votre équilibre devient instable
- une lampe frontale à led rouge, pour voir la nuit dans être ébloui et garder les mains libres en cas de nécessité
Un kit d’urgence pour faire face en toute circonstance
Il importe également de ne jamais partir sans sa pharmacie d’urgence car malgré vos efforts de prévention, vous ne pouvez être sûr de rester totalement à l’abri d’une mésaventure.
Votre kit des premiers soins pourra ainsi contenir, notamment,
- du gel hydroalcoolique pour se désinfecter les main avant d’intervenir sur une blessure
- un spray désinfectant
- des compresses pour arrêter un saignement, ainsi qu’une bande pour maintenir un point de compression
- des pansements ou du sparadrap
- un gel d’arnica pour adoucir une contusion et limiter le développement d’un hématome
- du doliprane, pour gérer la douleur d’un traumatisme ou réduire une poussée de fièvre, suite à une insolation par exemple,
- une agrafeuse ou un tube de glue gel pour refermer facilement et rapidement une coupure
- une couverture de survie pour permettre à la personne blessée de garder sa chaleur et donc son énergie
Les coordonnées des secours en mer
En cas de survenue d’un accident grave, il faut être capable de réagir sans hésitation aucune. Pour rester opérationnel malgré le choc et l’anxiété, mieux vaut avoir préparé à l’avance un mémo reprenant les procédures nécessaires pour contacter les secours en mer :
Vous pouvez ainsi appeler les CROSS, qui coordonnent les secours sur les espaces maritimes placés sous leurs responsabilités opérationnelles et appartiennent au réseau international des Centres de coordination de sauvetage maritime :
- En navigation côtière, les CROSS sont joignables par VHF via le canal 16, 7 jours sur 7 et 24 h sur 24
- Pour les navigations plus hauturières, un numéro d’urgence en mer a été créé en 2014, le 196 pour les mobiles GSM, qui rappelle le canal 16 de la VHF sans pour autant le remplacer.
En cas d’urgence médicale, vous pouvez aussi contacter, directement ou via les CROSS, le Centre de Consultation Médical Maritime, qui offre un service de consultation et d’assistance télé-médicales à tous les navires battant pavillon français sur l’ensemble des mers du globe.
Le CCMM peut être joint à tout moment (24h/24h, 7j/7 et 365j/an) pour les consultations médicales urgentes au 32 ou 38 sur le réseau INMARSAT ou au +33 5 34 39 33 33 par GSM.
Nous vous souhaitons bon vent et bonne mer.
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