Cet article s’inscrit dans notre défi “25 savoirs- faire & astuces en 25 semaines”.
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Anneaux de friction … quel drôle de nom !
Sur un voilier, on recherche l’efficacité, la rapidité, la performance. On n’a donc a priori que faire d’un accastillage qui annonce sans ambiguité ces frottements parasites et agaçants que l’on cherche plutôt à réduire et à éviter lors de nos manœuvres.
Alors, pourquoi un défi sur un tel sujet, pensez-vous d’emblée très légitimement ?
Tout simplement parce qu’il ne faut jamais se fier aux apparences et qu’il convient de relativiser cette faible efficacité apparente !
Une comparaison de prime abord défavorable aux anneaux de friction …
En moyenne, les frottements générés par tout dispositif de déviation d’un cordage provoquent une perte de charge de l’ordre de :
- 45% pour les anneaux de friction,
- 20% pour les poulies à bille,
- 5% pour les poulies à rouleau.
C‘est pourquoi, sur nos voiliers de croisière, nous utilisons majoritairement des poulies et notamment des poulies dites « à billes », ce qui ne signifie toutefois pas qu’elles sont équivalentes à un roulement à bille. En effet, une poulie à bille ne présente en fait qu’un simple axe inséré dans un palier lisse, qui permet de reprendre l’effort principal supporté par le réa, et des billes qui supportent, elles, les efforts parasites latéraux uniquement.
Les poulies à rouleaux, bien plus performantes mais également beaucoup plus chères, se retrouvent principalement sur les voiliers de régate ou les unités haut de gamme.
Afin de mieux apprécier les performances respectives de ces 3 dispositifs, le tableau ci-dessous illustre la charge développée par un winch, via un palan 5 brins, comparativement pour chacun d’eux :
Vous pouvez tout de suite vous rendre compte qu’après son passage dans 5 réas successifs, l’efficacité d’un palan 5 brins se retrouve complètement neutralisé par le mauvais rendement d’un anneau de friction et que dans le cas présent, ce dispositif n’apparaît donc absolument pas pertinent !
… Malgré leurs remarquables qualités cachées
Mais, mais, mais, car il y a toujours un mais, comparé à une poulie, l’anneau à friction présente l’avantage d’être plus léger et, pour les modestes plaisanciers que nous sommes, également beaucoup plus abordable, sans parler de sa grande fiabilité et de son caractère sécurisant (votre cordage passe dans l’anneau de friction alors que sa fixation passe tout autour, ce qui permet à votre cordage de ne pas être libéré en cas de casse contrairement à une poulie classique qui exploserait purement et simplement dans la même situation) même si, bien entendu, certaines poulies à transfiler offrent un niveau de sécurité équivalent mais l’accroche adaptée, donc spécifique, qu’elles nécessitent sur notre voilier ne facilite pas toujours leur bonne utilisation.
Ainsi, tout en étant 10 fois plus léger qu’une poulie présentant le même niveau de résistance, un anneau de friction est tout simplement 10 fois moins cher, car compte tenu à sa forte résistance à l’usure, liée notamment à l’absence de pièces mobiles, son coût de fabrication est très bas.
Et si les anneaux de friction ne sont pas adaptés aux systèmes à palan comme nous l’avons vu, ils peuvent par contre être très intéressants dans le cas d’un système en cascade.
Les anneaux de friction sont ainsi parfaitement adaptés aux charges statiques, résultant de la déviation d’un cordage qui ne nécessite pas (ou peu) de réglage une fois qu’il est sous tension. Ils sont idéaux pour guider les écoutes de génois et de spi, les bosses d’enrouleur, les barber-hauler, le lazy jack, un pataras en cascade et bien d’autres applications peu exigeantes en terme de précision des réglages.
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La poulie reste par contre indispensable pour toutes les applications qui nécessitent un réglage fréquent, ou pour lesquelles des frottements trop importants entraîneraient une perte significative de performance qui serait donc préjudiciable et pourrait rendre une manœuvre difficile voire impossible.
Dans le tableau ci-dessus, les chiffres présentés correspondent au système de relevage de notre quille préconisé par notre architecte qui a estimé l’effort nécessaire pour remonter 5 tonnes. Seule la solution performante «poulie à rouleaux » apparaît réaliste pour une telle application bien que cette dernière ne nécessite aucune réglage en navigation.
Comment optimiser le rendement des anneaux de friction ?
Attention, comme toujours, tous les anneaux de friction ne se valent pas et plus le métal les constituant sera lisse et dur, moins les frottements seront importants.
Les anneaux de friction, pour être les plus efficaces possibles, doivent donc faire l’objet d’une anodisation dite « dure », qui consiste à déposer sur une forte épaisseur (30 à 100 µm), une couche d’alumine protectrice.
Après ce traitement, il est également possible d’imprégner les anneaux au PTFE (téflon) afin d’améliorer leur état de surface et de diminuer ainsi encore leur coefficient de frottement.
Sur nos voiliers, l’anodisation dure correspond la plupart du temps à la couche noire visible sur l’accastillage en aluminium (winch, poulie, enrouleur …).
La performance et la durée de vie d’un anneau à friction dépendant directement de la qualité de cette anodisation, n’hésitez donc pas à choisir les anneaux présentant la plus grande épaisseur d’anodisation, et un enrichissement au PTFE.
En plus de choisir des anneaux à friction de qualité, il est également possible de limiter les frottements en utilisant un cordage présentant des propriétés glissantes.
Ainsi, le dyneema est idéal pour monter des anneaux à friction, car cette fibre est particulièrement lisse et glissante. Il est possible d’utiliser directement un cordage en dyneema pur ou d’ajouter simplement une surgaine en dyneema sur votre cordage, au niveau de la zone de réglage et de passage dans l’anneau de friction.
Vous trouverez toutes les informations utiles sur les fibres dyneema dans notre article « Utiliser des cordages en fibres textiles haute performance sur votre voilier »
Quand les anneaux de friction font preuve de fantaisie
Compte tenu des nombreux intérêts des anneaux de friction, les fabricants de ce type d’accastillage ont développé quelques variantes qui, dans certaines situations, peuvent s’avérer utiles :
il existe ainsi des versions d’anneaux de friction à visser (l’anneau se compose de 2 parties, l’une mâle et l’autre femelle), qui permettent une utilisation comme filoirs passe pont afin de faciliter les manœuvres. Ces anneaux de friction à visser peuvent faire également office de padeye et être utilisés pour fixer, par exemple, une poulie ou comme cadène afin de réaliser des transfilages pour la fixation de haubans ou de bastaques sur une cloison.
reposant sur le principe même de l’anneau de friction, la « poulie textile » de wichard propose en plus un usage en poulie ouvrante, ce qui permet de passer rapidement un cordage autour puis de l’attacher à un point d’ancrage avec sa solution textile rapide.
Pour dévier légèrement les écoutes sur les voiliers de 6 à 15 m, il existe des filoirs à fixation par vis dont les matériaux / revêtement de surface sont les mêmes que ceux des anneaux de friction.
Pour finir, les anneaux de friction existent dans toutes les dimensions, et il est possible d’en trouver de très petite taille (de quelques millimètres seulement) qui trouveront ainsi sans peine leur place à de nombreux endroits et pour de nombreux usages sur votre voilier.
En fonction de vos besoins, pensez donc avoir recours à cette solution simple, efficace et bon marché des anneaux de friction lorsque vous aurez besoin de remplacer ou d’optimiser un système en place.
Et en course comme en croisière, emportez systématiquement des anneaux à friction de taille variée. En cas de casse, ils seront très pratiques pour remplacer, ne serait-ce que temporairement, une poulie et ils pourront ainsi vous tirer d’un mauvais pas !
Nous vous souhaitons bon vent et bonne mer.
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