Pour beaucoup d’entre vous, partir en croisière rime désagréablement avec mal de mer.
Que vous soyez skipper émérite, plaisancier averti ou navigateur débutant, vous savez que ce trouble, qui appartient à la grande famille des maux des transports, peut affecter tout le monde, n’importe quand et dans toutes les conditions, bien entendu par mer agitée mais également, plus étonnant cela soit-il, par calme plat.
Bref, personne n’est à l’abri, même si seulement 25% à 30 % des navigateurs sont affectés, et cette incertitude vous effraie quelque peu, soit parce que vous êtes le chef de bord et ne pouvez faillir à vos responsabilités, soit parce que la perspective d’un équipage malade vous fait hésiter à tenter l’aventure.
Le mal de mer, également appelé naupathie, apparaît lorsque le cerveau reçoit des informations contradictoires de nos différents sens, entre nos yeux qui, posés sur un point fixe, ne perçoivent pas forcément le mouvement et notre oreille interne qui perçoit le contraire, tout comme notre voute plantaire.
La mémoire joue également un rôle dans l’apparition du mal de mer et si vous avez eu dans le passé une expérience désagréable, l’appréhension de revivre cette dernière pourra favoriser la survenue d’un nouvel épisode de naupathie.
Le mal de mer est fréquent les premiers jours de navigation mais il finit par disparaître dans 95 % des cas grâce à l’amarinage.
Se prémunir du mal de mer : la règle des 4F
4 facteurs ont été identifiés comme aggravants dans l’apparition du mal de mer alors qu’ils sont relativement faciles à combattre, il convient donc d’y être particulièrement attentifs dès votre embarquement :
- F comme Froid: en mer, ne laissez jamais le froid vous gagner. Que vous partiez pour quelques heures seulement ou pour une longue traversée, prévoyez toujours un équipement adapté à votre croisière, des vêtements techniques (sous couche pour évacuer l’humidité, pulls polaires pour conserver votre chaleur, et veste de quart pour vous protéger du vent et des embruns) sans oublier vos accessoires (écharpe, tube, bonnet, gants, chaussettes), et anticipez leur utilisation.
- F comme Fatigue : partez toujours en mer bien reposé, ce qui vous permettra également d’être alerte et donc de limiter les risques par une bonne analyse de la situation. Prévoyez pour cela de faire une bonne nuit avant de prendre le large, en embarquant si possible au minimum la veille de votre départ ou en adaptant votre programme et en prévoyant une courte
navigation pour commencer, qui vous offrira la possibilité de faire une petite sieste réparatrice si nécessaire.
- F comme Frousse : il importe d’embarquer en toute confiance, confiance dans votre programme, dans la météo à venir, dans votre équipage, car la peur paralyse et peut vous affaiblir en consommant une grande partie de votre énergie. Nourrissez des pensées positives et jetez à l’eau votre stress dès que vous quittez votre port d’attache.
- F comme Faim : de tout temps, la nourriture a toujours été un point essentiel en mer, pour maintenir au plus haut la motivation des équipages mais surtout leur état de forme. Il est très important de bien se nourrir sur un voilier et de respecter les temps de repas, tout autant que de prévoir des en-cas pour les petits creux, d’autant plus s’il fait froid ou si vous avez une activité physique soutenue. Et n’oubliez pas de bien vous hydratez en parallèle, en consommant sans modération des boissons chaudes ou froides (de préférence non alcoolisées) car le vent, les embruns et le soleil vous déshydratent sans que vous ne vous en rendiez toujours compte.
Quelques autres comportements efficaces à privilégier
Si malgré votre vigilance à bien respecter la règle des 4F et vos précautions, vous commencez à ressentir les premiers symptômes du mal de mer (maux de tête, frissons, transpiration excessive, vertiges, nausées, fatigue, somnolence), adoptez les comportements suivants pour rester bien actif, concentré et anticiper les mouvements du voilier :
- Restez dehors et actif : la chaleur et le confinement à l’intérieur du voilier accélèrent l’arrivée du mal de mer. Évitez donc de rester au fond de votre cabine à attendre avec appréhension son arrivée et privilégiez plutôt le pont ou le cockpit, pour observer la mer tout en étant à l’air libre, afin de synchroniser votre vue avec les mouvements ressentis. Participez également aux manœuvres, barrez, échangez avec le reste de l’équipage, cela vous évitera de penser au mal de mer et d’encourager sa survenue.
- Rechercher le centre de gravité du bateau : si vous devez vous installer à l’intérieur de votre voilier, en cas d’intempérie, le temps d’un quart de repos ou pour la nuit entière, rechercher en priorité le centre de gravité du voilier au niveau duquel vous serez moins secoués. N’hésitez pas à vous y installez, même si vous vous retrouvez à dormir sous la table du carré !
- Fuyez les odeurs : si votre estomac commence à vouloir faire des acrobaties, évitez de vous exposer aux odeurs fortes, comme celles de gazoil, de cigarette, de poisson mais aussi de nourriture. Restez ainsi bien au vent de la cambuse, du refroidissement du moteur ou des pêcheurs de votre équipage, pour pouvoir participer à la vie du voilier sans être incommodé par les activités des uns et des autres.
- Ignorez les gens malades : le mal de mer est malheureusement contagieux et voir (ou simplement entendre) d’autres personnes malades peut vous conduire à vous sentir mal à votre tour. N’hésitez pas, une fois n’est pas coutume, à être un peu égoïste et à détourner le regard et à vous éloignez si vous le pouvez, pour essayer de vous concentrer sur autre chose.
Au besoin, évitez de sortir ou sachez faire demi-tour, quand les conditions sont trop aléatoires ou peu confortables, pour éviter de vous trouver en mauvaise posture et limiter les risques inutiles. Si vous attrapez le mal de mer, vous n’aurez de toute façon envie que d’une seule chose, que votre croisière s’arrête, et vite …
Et du côté des traitements préventifs et symptomatiques ?
Les médicaments ne sont pas la seule solution pour résister au mal de mer. Même s’ils peuvent s’avérer efficaces, il est déconseillé de les utiliser régulièrement, notamment au regard de leurs possibles effets indésirables.
Avant d’y avoir recours, mieux vaut donc tester l’efficacité de remèdes plus naturels qui ont déjà fait leur preuve afin de voir s’ils peuvent également vous convenir :
- consommer du gingembre : cet épice est réputé pour aider à lutter contre le mal de mer. Il peut être pris frais, en poudre, en jus, ou en infusion, il conserve toutes ses vertus quelque soit sa présentation.
- utiliser l’huile essentielle de Menthe Poivrée : cette huile essentielle peut donner des résultats étonnants. Il suffit d’en mettre 1 à 2 gouttes sur vos poignets puis de vous tamponner le cou ensuite.
- stimuler le point d’acupuncture MC6 : il existe en médecine traditionnelle chinoise un point d’acupuncture qui calme les nausées et les vomissements et est donc très utilisé pour prévenir et traiter le mal des transports notamment. MC6 est situé à exactement 3 largeurs de doigts (les vôtres) au-dessus du pli du poignet, entre les 2 tendons. Vous pouvez choisir d’utiliser des bracelets
d’acupression anti-nausées, en positionnant bien la petite boule sur ce point à chacun de vos poignets ou de masser puissamment les points MC6 de vos deux poignets régulièrement.
- porter des lunettes boarding ring : concues en 2011, ces lunettes possèdent des cercles remplis d’un liquide coloré autour des verres et des branches. Ce liquide bouge en fonction des mouvements du voilier, ce qui permet de coordonner votre vision avec votre oreille interne et de transmettre une information cohérente à votre cerveau. Selon son concepteur Hubert Jeannin , un port de 12 minutes suffit, dès que les premiers symptômes du mal de mer se font sentir.
Et si vraiment aucun de ces remèdes ne vient à bout du mal de mer tenace qui vous assaille dès que vous mettez le pied sur le pont d’un voilier, vous pouvez essayer d’avoir recours à une rééducation optocinétique. Les exercices opthosymétriques se réalisent avec des boules à facettes (comme dans les boites de nuit), sur des fauteuils rotatoires. Le but est de gêner les patients, sans toutefois les rendre malades, afin qu’ils apprennent à gérer ce conflit sensoriel et y apportent une solution . Une dizaine de séances de 30 minutes étant nécessaires pour faire disparaître les nausées à bord d’un voilier, pensez à anticiper ces dernières au regard de la date de votre prochaine croisière à la voile.
Nous vous souhaitons bon vent et bonne mer