Voilà trois jours que Williwaw caracole sur l’océan !
Trois jours que l’alizé s’est enfin réveillé, après 5 longues journées de pétole au cours desquelles même notre spi refusait de se gonfler.
Trois jours que nous avançons à 6 nœuds de moyenne, nos voiles d’avant en ciseaux gonflées à bloc, prêtes à s’envoler.
Ca chahute un peu à l’intérieur, le bruit de l’eau contre la coque est puissant et omniprésent mais il nous tire de la léthargie dans laquelle l’Atlantique, contre toute attente, nous avait plongés ces derniers temps.
Comme Williwaw, nous nous enivrons sans modération de ce vent et des embruns, notre vitesse nous grise, nous nous délectons de cette fin de transat énergique et vivante !
Et puis soudain, sur l’horizon, se dessine enfin notre destination. Les Saintes, si bien-nommées, nous apparaissent auréolées de la lumière chaude et flamboyante d’un coucher de soleil tropical.
A cet instant, nos pensées sont confuses.
Nous sommes partagés entre la joie provoquée par cette arrivée prochaine, après 18 jours de mer, les promesses que nous réservent sans aucun doute ces îles pittoresques et chamarrées, la fierté profonde d’avoir osé traverser cet océan et d’être allé à la rencontre de nos rêves et la fin prochaine de cette navigation symbolique, de cette parenthèse hors du temps qui nous a offert des moments uniques et indescriptibles, de la connexion intense que nous avons eu tous au long de cette aventure avec la Nature sans oublier cette rencontre avec nous même, permise par notre isolement et notre éloignement volontaire des terres connues et maîtrisées pour rejoindre des rivages lointains incertains …
La nuit est tombée lorsque nous embouquons le canal des Saintes mais tous nos sens sont en éveil. Les odeurs chaudes de la terre viennent chatouiller nos narines, les sonorités rythmées d’un zouc caribéen nous parviennent de Terre de Haut, il y a comme une palpitation dans l’air, qui trouve écho avec nos trépidations intérieures.
A l’aide de notre cartographie des lieux et de notre radar, nous nous faufilons discrètement dans ce mouillage tant rêvé et tant désiré, pour jeter l’ancre en toute sécurité.
Ca y est, nous y sommes !
L’immobilité soudaine de Williwaw nous prend au dépourvu, nous déstabilise, nous fait perdre notre équilibre.
Nous nous regardons, étonnés, ébahis, abasourdis, épatés … nous l’avons fait, nous avons traversé l’Atlantique !
Brève de mer #1